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S’organiser pour débuter un jardin pédagogique

09 / 07 / 2020 | Manuella Van Praët | Groupe académique EDD - « Jardins de Créteil »

Cet article, élaboré par Anne Ciavatti et Julien Calas, professeurs et membres du groupe académique Les jardins de Créteil, propose une liste de points à anticiper, afin de bien s’organiser lorsque l’on débute un jardin potager pédagogique.

Avant de se lancer dans un jardin potager dans un établissement scolaire, il est bienvenu d’avoir réfléchi à quelques points afin de s’éviter certaines déconvenues.
Voici quelques questions à se poser en amont afin de s’organiser...

1. Sur quel temps et avec qui ?

Sur quel temps ?

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Pour monter ou reprendre un tel projet, il est d’abord nécessaire de se demander sous quelle forme vous souhaitez exploiter et entretenir le jardin.

 en club / atelier (méridien ou non) : combien de fois par semaine ou par mois ? sur quel horaire ? Point de vigilance : Dans certains établissements, une distinction est faite entre le statut “club” et le statut “atelier”, ce dernier étant seul rémunéré.
 en cours : EPI ? Projet de classe, de niveau, de cycle ?
 Sur des heures de permanence, de retenue ou de TIG des élèves (à penser et à expliciter comme une opportunité d’ouverture et non comme une punition : il serait regrettable que jardiner devienne une punition).

Avec qui ?

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Sauf à vouloir consacrer beaucoup de temps et d’énergie au jardin potager de l’établissement, il est vivement déconseillé de prendre en charge la gestion d’un jardin potager seul (sauf s’il s’agit d’un ou deux carrés potager), surtout si tout est à faire ou si vous (re)partez d’une friche.

 Concernant le chef / la cheffe d’établissement :
Pour lancer le jardin, il est d’abord nécessaire d’obtenir l’aval de la Direction et l’accord du conseil départemental ou de la région. Il faut ensuite déterminer avec elle et le gestionnaire, la hauteur de l’investissement financier que l’établissement est prêt à faire pour le matériel, mais aussi en terme de rémunération d’heures (souvent hebdomadaires) allouées aux personnels prenant part activement à l’entretien ou l’animation d’un club / atelier consacré au jardinage. Il s’agit ici d’établir un ou des devis et de rédiger une fiche explicitant le projet, les objectifs pédagogiques et les besoins.

 Concernant le personnel enseignant  :
Que ce soit en club ou en cours, l’idéal est de constituer une équipe pédagogique dans le cas d’un projet classe, ou un groupe de plusieurs collègues enseignants pour un club, prêts à s’investir souvent au-delà de la plage horaire rémunérée.
Le ou la professeur.e documentaliste est notamment précieu.x.se pour participer à l’élaboration d’une grainothèque au CDI après les premières récoltes.
S’il y en a dans votre établissement, solliciter les enseignants de SEGPA notamment des champs professionnels « Habitat » et « Espace rural et environnemental » permet de monter des projets communs et concrets en valorisant le travail de ces sections (cabanon, point d’eau, carré potager, composteur, nichoirs…)

 Concernant les élèves : Dans le cas d’un club méridien, il faut penser au recrutement (voir l’article : Communiquer) sans oublier les section ULIS et SEGPA.

 Concernant le ou la chef.fe de restauration scolaire, son équipe et la vie scolaire :
Que ce soit en cuisine ou en salle, la participation volontaire des agents de la restauration scolaire et parfois des AED est capitale pour la collecte des biodéchets à destination du composteur ou l’aide au tri.
Pour un club méridien, la vie scolaire devra être prévenue pour laisser passer en priorité les élèves des clubs, notamment potager.

2. Avec quel argent ?

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Pour ce point, il est nécessaire de vous rapprocher du chef d’établissement et de votre gestionnaire.
Il faut au préalable leur préparer une fiche “projet”, un premier devis (avec si possible une estimation de vos besoins financiers sur l’année) et la forme sous laquelle vous souhaitez être rémunéré.e.s.

Les modes de rémunération :
Plusieurs modes de rémunération sont possibles : HSE, HSA ou IMP. Il faut toutefois tenir compte que vous travaillerez avec des êtres vivants et que votre travail ne s’arrêtera donc pas aux vacances scolaires. En effet, certaines étapes comme les semis, les plantations, les tailles… ne peuvent pas être décalées dans le temps. Le travail en extérieur est également totalement météo-dépendant et la fréquence des arrosages, par exemple, s’en fera donc ressentir. Les tâches qui seront repoussées à cause de la météo seront souvent réalisées par vous-même en l’absence des élèves.
Il faut également tenir compte de la taille de votre projet de jardin : le temps que vous y consacrerez sera souvent proportionnel à la surface.

Les fonds :
 Le chef d’établissement décide de mettre le budget qu’il peut / souhaite mettre. Ce budget est pris sur les fonds propres de l’établissement. Présenter trois devis (budget serré, confortable et idéal) peut constituer une bonne stratégie.
Pour la première année et la mise en place d’un jardin en partant de zéro, il est nécessaire de compter au moins 500€.

 Le foyer peut également aider en participant à l’achat de matériel ou à des sorties en lien avec le jardin. Il faudra contacter les responsables du FSE (Foyer Socio-Educatif).

 Votre projet peut aussi être présenté au conseil d’administration et, dans ce cas-là, le gestionnaire peut décider de créer une ligne dans le budget pour les dépenses et les revenus associés. En général, cette ligne concerne l’EDD dont le jardin n’est qu’une composante.

 Ils peuvent aussi provenir d’une aide de la mairie (écoles), du département (collèges) ou de la région (lycées) ; n’hésitez pas à solliciter la direction des espaces verts et du paysage et la Direction de l’éducation de ces administrations.

 Pour les 80 cités éducatives labellisées en septembre 2019, il est possible de faire une demande de dotation autour d’un projet.

N’hésitez pas à solliciter le référent EDD ou le gestionnaire de votre établissement pour être éclairé(e) sur d’éventuelles démarches (selon votre département ou votre région) qui vous permettraient d’obtenir des subventions et/ou du matériel.

3. Avec quoi ?

Le matériel à votre disposition dépend de votre établissement et de votre localisation.

Matériel

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Selon les dotations départementales ou régionales, l’achat de matériel viendra compléter ce qu’il vous manque encore. Dans le Val-de-Marne par exemple, il est possible de demander du matériel lors de la création du jardin (lien ici).
Voici une liste non exhaustive du matériel basique qui semble indispensable pour commencer :
- Des gants de jardinage (prendre diverses tailles) ;
 Des arrosoirs : veiller à ce qu’ils ne soient pas tous trop grands (10 litres) et donc trop lourd pour les élèves ;
 Pour travailler le sol : des bêches, binettes, râteaux, pelles et grelinettes + couteau désherbeur et petites serfouettes avec griffe trois dents et racloir ;
 Des sécateurs ;
 Du raffia naturel.

Vous trouverez aisément ce type de matériel dans les grandes enseignes de bricolage ou de jardinage. Ne négligez pas certains commerces en ligne (Français) aux prix compétitifs notamment pour les tuteurs, arrosage goutte-à-goutte ou voile d’hivernage souvent chers en magasin. N’achetez pas à emprunter le matériel aux agents techniques, aux ateliers SEGPA (scie, visseuse…) voire aux associations locales.

Végétaux

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Les semences reproductibles bio et dites “paysannes”, non-hybrides et non-OGM sont à privilégier notamment si vous souhaitez récolter vos graines pour les replanter, les offrir ou les échanger.
Voici une liste non exhaustive de plantes qu’il est facile de faire pousser au départ :
 Bulbes ; Iris, tulipes, oignons...
 Aromates : Ciboulettes, thym, persil, coriandre, menthe, estragon, romarin, thym...
 Légumes et fruits ; Radis, tomates cerises, fraises, salades, carottes, framboisier, pois...

Outre les dotations du Conseil Départemental ou Régional, certaines mairies pourraient vous garder du BRF (bois raméal fragmenté) ou d’autres matières premières. Des associations ou commerces accepterons peut-être aussi de vous donner des plants voire du matériel ; n’hésitez pas à aller sonner à la porte de ceux qui vous entourent.

4. Où s’installer ?

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L’emplacement de votre jardin est de loin l’élément le plus important et à ne pas négliger pour assurer la pérennité de votre projet. Votre jardin est à penser au présent, mais aussi, au futur.

 L’ensoleillement doit être maximum tout au long de la journée. Vous pouvez faire des mesures de luminosité et de température avec les élèves à différentes heures de la journée et de la semaine à différents endroits de votre établissement. Sans matériel particulier, l’observation et les croquis à différents moments de la journée et de l’année vous permettront de commencer puis d’ajuster : l’exemple ci-dessous montre le plan du jardin encore en projet avec les ombres portées selon l’heure d’une journée de septembre au Collège A. Schweitzer de Créteil. Les huit carrés potagers ont finalement été implantés dans les parties les plus ensoleillées.

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 L’accès à un point d’eau proche est indispensable afin d’entretenir les plantations et éviter aux élèves les allées et venues avec des arrosoirs pleins et donc lourds.

 La nature du sol et de votre jardin : si vous décidez de faire des plantations hors sol, les plantes seront plus soumises au stress hydrique et l’arrosage devra donc être plus fréquent. De simples tests pourront vous indiquer le type de sol auquel vous avez affaire (Article ici).

 L’emplacement des plantes est aussi à réfléchir : celui des vivaces par exemple est très important car elles ont vocation à occuper un espace plusieurs années. Il est conseillé de planter en périphérie les arbres et arbustes de manière à ce qu’ils fassent le moins d’ombre possible dans votre jardin. Une stratification de la végétation permet également d’augmenter les niches écologiques (et donc la biodiversité du jardin) ; la disposition des plants en fonction de la hauteur des systèmes foliaires permet de limiter la concurrence pour la lumière. Faire grimper celles qui le peuvent vous libère de la place au sol et embellira votre jardin.

 L’alternance entre les cultures à croissance rapide avec celles à croissance lente vous permet d’optimiser votre espace. Ainsi entre vos pieds de tomates (à croissance lente) vous pourrez planter des salades (à croissance rapide). Vos salades seront récoltées avant que le feuillage des tomates ne fasse trop d’ombre. Au sujet du compagnonnage des plantes, vous trouverez des tableaux récapitulatifs dans de nombreux livres et sur internet (attention, on trouve sur internet tout et son contraire).

 La délimitation de vos plantations est également importante, elle évite aux jardiniers et visiteurs de les piétiner. Il est idéal d’aménager des allées (prévoir 60 cm pour le passage d’une brouette) et de faire des carrés ou des rectangles potager. Idéalement, ces carrés ou rectangles ne doivent pas dépasser 1,20 m de largeur afin que les élèves puissent y travailler de part et d’autres sans pour autant y mettre leurs pieds. Ils garderont leurs chaussures propres, ne saliront pas l’intérieur des bâtiments et ne tasseront pas la terre.

5. Selon quel(s) calendrier(s) ?

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Travailler au jardin nécessite d’apprendre aux élèves la patience et l’organisation. La patience, car le temps des semis, de la croissance, des observations et des récoltes peut s’étaler sur plusieurs mois. L’organisation, pour adapter les travaux au jardin en fonction des divers calendriers : celui des semis (en godet ou direct), repiquages, plantations en pleine terre et récolte bien sûr, mais aussi celui des promotions dans certaines enseignes, et surtout, celui du calendrier scolaire. Il faut en effet penser aux vacances, notamment celles d’été, et anticiper des solutions d’arrosage, d’entretien et de récolte : s’organiser entre collègues, personnels habitant sur place et/ou réfléchir à une solution d’arrosage automatique économe ?

Pour vos débuts au jardin, nous vous conseillons de choisir des cultures dites “faciles” avec un temps de culture compatible avec le calendrier scolaire. Afin d’avoir un jardin diversifié dès les premières années, pensez à installer des plantes vivaces comme des arbustes fruitiers et des arbres qui pourront grandir avec votre projet et accueillir des oiseaux qui seront très utiles au jardin (Article ici).