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Et si ma classe idéale était un jardin …

15 / 05 / 2020 | Manuella Van Praët | Groupe académique EDD - « Jardins de Créteil »

« Et si ma classe idéale était un jardin … » Voilà la première réflexion qu’ont eue Laurent MAZO (enseignant d’ULIS) et Chloé ARNEODO (enseignante de SVT). Se situant à Bois le roi, en Seine-et-Marne (77), près de la forêt de Fontainebleau, leur établissement est un lieu propice à la découverte de la nature. Cependant, ils n’avaient pas de jardin pédagogique au sein du collège (hormis deux bacs de potager qui s’intégrait à un autre projet). Ainsi, leur objectif a été d’amener les élèves à imaginer un endroit extérieur de détente et de travail, le choix leur revenant de construire leur classe idéale, avec leurs idées, leurs envies en tenant compte des besoins et des idées de chacun.
Chloé ARNEODO partage dans cet article leurs réflexions, leur cheminement dans le début de ce projet.

Ce concept qui permet un apprentissage original n’est pas nouveau. Au Québec par exemple, il existe déjà : le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur du Québec a financé un sondage qui « visait à identifier des initiatives inspirantes d’éducation à l’extérieur ainsi que les perceptions (besoins et idées en lien avec cette approche) ». On peut le lire dans ce rapport.
Des rapports et témoignages internationaux (1, 2) renforcent l’hypothèse des bienfaits de l’enseignement dans un cadre paisible et connecté avec la nature. Cet environnement aurait notamment un impact sur le décrochage scolaire, ainsi que sur les élèves TDA (troubles du déficit de l’attention), TDAH (troubles du déficit de l’attention avec hyperactivité) comme le montre ce document (source : Avis du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MÉES) du Québec).

Ainsi nous pouvons penser, qu’en changeant de décor, en respirant l’air frais et en étant au contact avec la nature, le comportement des élèves pourrait se modifier, et que cet environnement aurait également un impact sur la relation à l’autre. Ils pourraient être plus calmes, plus attentifs, plus réceptifs et se sentir moins enfermés dans une structure déjà en place (structure construite par des adultes, avec une vision d’adulte). A leur retour en classe, les élèves seraient alors plus apaisés, revigorés et détendus. De fait, ils seraient plus susceptibles d’emmagasiner de nouvelles informations et donc d’apprendre. Il s’agit donc de nos hypothèses de départ, qui ont guidé la construction de notre projet.

Construire ensemble, élèves et adultes, cet environnement favorable à leur apprentissage dans un contexte idyllique : Et bien, on va le faire !

Tout d’abord, nous avons élaboré les plans du jardin et de la classe, en demandant la collaboration de notre collègue d’arts plastiques, Isabelle BARDEL. Elle a fait réfléchir cinq classes de 6ème, afin qu’ils représentent leur classe idéale en imaginant une cabane idéale.
Les objectifs visés en arts plastiques ont été les suivants :

• Faire la différence entre cabane (petite habitation grossièrement construite) et habitation (cas particulier, lié à une fonction précise) ;
• Créer un espace de vie dans le collège dont la fonction resterait à définir ;
• Parvenir à se projeter dans un espace hypothétique.
Cela s’inscrit dans le programme des arts plastiques [L’espace en trois dimensions ; mettre en œuvre un projet artistique ; identifier les principaux outils et compétences nécessaires à la réalisation d’un projet artistique- Domaine du socle, 2, 3, 5].

Dans un deuxième temps, nous nous sommes appuyés sur ces représentations élaborées par les élèves en Arts Plastiques que nous avons sélectionnées, afin de lister toutes les idées intéressantes : par exemple, utiliser de la corde pour faire un toit, des planches en bois pour le contour, …

Par ailleurs, nous avons également construit ce projet autour de l’inclusion des élèves en dispositif Ulis. Notre objectif a été d’utiliser les espaces extérieurs pour enseigner et renforcer la place des élèves ULIS au sein du collège, dans un lieu de rencontre et de partage.

Pour ce faire, voici ce que nous prévoyons de faire ensuite :
Lorsque notre classe jardin sera achevée, nous y ferons travailler nos élèves en dispositif ULIS en groupe avec des élèves de 6ème afin de favoriser la coopération et créer du lien entre eux. [domaine 2 du socle : Les méthodes et outils pour apprendre]
Ils pourront faire découvrir à leurs camarades de tous niveaux, des jeux de sociétés sur les temps de pauses méridiennes (avec l’aide de leur professeur). En étant dans une situation d’expert sur des jeux qu’ils maîtrisent, ils pourraient se sentir valorisés.
Cette classe pourra également être un espace d’expression où ils pourraient prendre la parole pour expliquer les règles du jeu. Cela pourra contribuer à leur socialisation et à faciliter les progrès dans le domaine 1 du socle [Domaine 1 du socle : Les langages pour penser et communiquer ].
Ce lieu de détente pourra favoriser la lecture et le partage :
• une boîte à livre accessible à tous les membres du collège (élèves, enseignants, agents techniques etc) sera à disposition à tous moments.
Chacun pourra y déposer un livre qu’il aimerait faire partager. Par exemple, les élèves du dispositif Ulis pourront présenter à leurs camarades des livres différents d’une semaine à l’autre, qu’ils auront sélectionnés (avec leur professeur) et déposés dans la boîte à livre.
• différents enseignants pourront venir avec les élèves sur leurs créneaux pour lire des contes (en français), des ouvrages, des mangas avec le professeur documentaliste, ...
Ce pourra être également un lieu pour s’exprimer en utilisant les langages des arts et du corps [Domaine 1 du socle] à travers :
• la réalisation de productions plastiques,
• la construction d’instruments de musique par les élèves à partir de bois mort et de matériaux recyclés (dans une optique d’ODD),
• le chant,
• le théâtre avec les professeurs de lettres et de langues (récitations de poèmes en lien avec la nature, découverte des contes …).
Ce nouvel environnement de travail sera une façon totalement différente d’aborder l’enseignement des Sciences : En effet, pourquoi apporter la nature dans une classe alors qu’on pourrait transporter cette classe dans la nature ?
Le professeur de SVT pourra par exemple enseigner la biodiversité et le développement des végétaux ; l’enseignant de physique chimie, lui, travailler sur « les composants du sol ».
Ce sera tout simplement un espace pour tous et pas simplement pour l’enseignement :
• un lieu pour faire de la médiation par les pairs, un lieu pour découvrir les sensations et les émotions [Domaine 5 : Les représentations du monde et l’activité humaine] que ce cadre apaisant peut développer,
• un lieu où tous les personnels confondus y viendraient afin de se détendre, échanger.

En conclusion, ce sera un environnement favorable au respect de l’autre et de la nature ; un environnement propice au mieux vivre ensemble (ceci s’inscrit dans le domaine 3 du socle [La formation de la personne et du citoyen]).

Le projet est à l’arrêt suite aux mesures de confinement. Nous vous informerons des suites dans un prochain article …